31 octobre. – Le vandale.
Balzac, seul, aurait pu l’imaginer. Voici l’histoire que me conte Demotte, l’antiquaire de la rue de Berri, en me montrant dans un immense garage d’automobiles à Levallois les restes d’une belle façade de château gothique. « Ces pierres, ces portes, ces fenêtres proviennent d’un château à Charantonnet qui était habité par une vieille famille de nobles très pauvres. Le greffier de Sancerre, la ville voisine, s’acharnait contre eux pour une cause que j’ignore. Il parvint à consommer leur ruine, fit vendre leur château et l’acheta. Sa vengeance ne s’arrêta pas là. Son idée était de démolir le château de fond en comble. J’arrivai en même temps que les démolisseurs. Je lui dis : « Arrêtez-les. – Non, je veux détruire ce château. – Mais pourquoi ? – Je veux le détruire. – Je vous l’achète, voici mon offre. – Je m’en moque, je veux détruire ce château. – Et cette destruction, combien vous coûte-t-elle ? – Trente mille francs. – Je vous les donne. – Je n’en veux pas, je veux détruire ce château. »
« Je n’ai jamais pu sortir une autre phrase de la bouche de cet homme. Je me suis arrangé avec l’entrepreneur pour sauver ces restes. »
La Toussaint.
Comme presque tous les dimanches, je me rends au petit cimetière Montparnasse sur la tombe de mes parents que j’ai tant aimés. La prochaine place est pour moi. Je porte toujours en moi l’effroi de ne pas descendre dans la tombe à mon juste tour.
La grippe*.
Soldats français morts de la "grippe espagnole" en 1918
Une épidémie affreuse ravage le monde. Elle tue plus que la guerre. La semaine dernière, à Paris, plus de deux mille cinq cents morts au lieu de la moyenne de sept cents. Les entreprises de pompes funèbres manquent de bras et de matériel, et quand les pauvres meurent ensemble, on les entasse dans la même bière.
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Note de l'auteure du blog
* La grippe de 1918, surnommée « grippe espagnole », est due à une souche (H1N1) particulièrement virulente et contagieuse de grippe qui s'est répandue en pandémie de 1918 à 1919. Cette pandémie a fait 30 millions de morts selon l'Institut Pasteur, et jusqu'à 100 millions selon certaines réévaluations récentes. Elle serait la pandémie la plus mortelle de l'histoire dans un laps de temps aussi court, devant les 34 millions de morts (estimation) de la peste noire.
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Note de l'auteure du blog
* La grippe de 1918, surnommée « grippe espagnole », est due à une souche (H1N1) particulièrement virulente et contagieuse de grippe qui s'est répandue en pandémie de 1918 à 1919. Cette pandémie a fait 30 millions de morts selon l'Institut Pasteur, et jusqu'à 100 millions selon certaines réévaluations récentes. Elle serait la pandémie la plus mortelle de l'histoire dans un laps de temps aussi court, devant les 34 millions de morts (estimation) de la peste noire.
Apparemment originaire de Chine, le virus a gagné rapidement les États-Unis, où il aurait muté pour devenir plus mortel. Cette nouvelle souche est trente fois plus mortelle que les grippes communes avec 3 % des malades. Elle devint une pandémie, lorsqu'elle passa des États-Unis à l'Europe, puis dans le monde entier par les échanges entre les métropoles européennes et leurs colonies.
Elle fit environ 408 000 morts en France, mais la censure de guerre en limita l'écho, les journaux annonçant une nouvelle épidémie en Espagne, pays neutre et donc moins censuré, alors que l'épidémie faisait déjà ses ravages en France. Elle se déroula essentiellement durant l'hiver 1918-1919, avec 1 milliard de malades dans le monde, et 20 à 40 millions de morts, selon de premières estimations très imprécises faute de statistiques établies à l'époque. Au début du XXIe siècle, le maximum de la fourchette reste imprécis mais a été porté à 50-100 millions, après intégration des évaluations rétrospectives concernant les pays asiatiques, africains et sud-américains.
En quelques mois, la pandémie fit plus de victimes que la Première Guerre mondiale qui se terminait cette même année 1918 ; certains pays seront encore touchés en 1919.
Voir plus de détails sur le virus et la pandémie sur Slate
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Extrait de Journal d'un collectionneur de René Gimpel - Edition Calmann-Lévy 1963
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