jeudi 27 août 2015

4e Carnet - 20/25 février 1919

20 février. – Attentat contre Clemenceau.
Source Grande Guerre

On a tiré sept balles sur lui dont deux l’ont atteint. Il ne serait pas sérieusement blessé.

Ernest apprend à lire.

J’aurais aimé qu’en ce jour il me fît une réflexion quelconque, mais le jour qui devra lui apporter tant de joie avec tant de peine, ce jour ressemble pour lui aux autres jours.

25 février. – Au musée de Cleveland.

S’ouvre une petite exposition d’art français où se fourvoient des meubles anglais et italiens. Je signale aux conservateurs un peu ignorants ces loups auprès de nos bergères. Je leur fais retirer quelques dessins faux, genre XVIIIe, prêtés par le dessinateur français X… Je suis certain qu’ils sont de lui. C’est une façon de se voir exposé dans un musée. Il a un petit talent d’illustrateur. Mais il est lamentable dans l’imitation XVIIIe et croit qu’on se peut méprendre quand il imite Watteau ou Fragonard*. Le musée est un joli petit bâtiment en marbre, inauguré depuis moins de trois ans et déjà assez riche en dons : un beau Puvis de Chavannes, l'Eté ; une collection assez pauvre de primitifs. Je remarque un tout petit tableau, un Christ, proche de Simone Martini.


On s’intéresse beaucoup à l’art ici ; la ville est riche parce qu’elle est entourée de mines de charbon et de puits de pétrole. On y fabrique des automobiles. Les voitures y sont si nombreuses qu’on ne peut les garer qu’en les plaçant perpendiculairement aux trottoirs. Williams me disait très sérieusement l’autre jour : « A Cleveland et à Détroit, il faut être mendiant pour ne pas avoir d’automobile. »
A part un ou deux bâtiments publics, poste, douane, où l’on sent l’influence de l’École des beaux-arts, je n’emporte de Cleveland que la surprise d’avoir trouvé, le matin, sous la porte de ma chambre, le journal de la ville fourni gratuitement par l’hôtel, et aussi le souvenir de mon étonnement en constatant, le soir, à 7 heures, quand je sortais de ma chambre, que ma clef fermait automatiquement toutes les lumières et qu’elle les ouvrait quand j’y rentrais.

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Note de Gimpel

* J’ai prêté une superbe console en fer forgé Louis XIV, deux tableaux de Drouais achetés vingt mille francs à Guiraud qui les avait découverts à Nice. Un David repris à Berwind dans un échange. Une commode en acajou, signée Riesener, deux superbes fauteuils Régence, tapisserie de Paris.

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Extrait de Journal d'un collectionneur de René Gimpel - Edition Calmann-Lévy 1963

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